Caricature par WANER (à lire aussi dans "Siné-Mensuel")
le figaro
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Esprit en pet
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Caricature Serge Dassault
La Semaine de Zombi. Vendredi.
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Revue de presse BD (279)
Catherine Sinet caricaturée par Jiho.
+ Une partie de la presse satirique française vit sous perfusion de dons (des abonnés). Ironie du sort, le massacre des plus talentueux dessinateurs de "Charlie-Hebdo" a relancé ce titre à l'agonie, placé sous la protection du ministère de l'Intérieur.
On apprend grâce à cette interview de sa directrice Catherine Sinet dans "L'Humanité", que "Siné Mensuel" survit aussi grâce aux dons des lecteurs (et quelques bonnes ventes au numéro) ; la directrice de "Siné Mensuel" estime à 70.000 euros le coût de fabrication de son mensuel. On regrette que les frais ne soient pas détaillés, pour connaître le coût de la distribution.
La presse gratuite publicitaire, financée par des groupes industriels, reflète certainement mieux notre époque que les derniers titres de presse satirique, vestiges de l'âge d'or de la presse écrite.
Autre fait significatif : la presse et les journalistes français furent systématiquement pris pour cible par les rénovateurs de la presse satirique et/ou indépendante dans les années 60 (Siné, Choron, Cavanna...) ; la culture libérale au contraire fait du journaliste un véritable héros, aux côtés du médecin ou du policier (Tintin, bien sûr, mais aussi Superman).
+ La récente disparition de Serge Dassault (né en 1925) n'est pas seulement celle d'un industriel de l'aéronautique militaire, mais aussi d'un patron de presse engagé. On imagine que les abonnés du "Figaro" et les nombreux journalistes employés par Dassault sont plongés dans l'affliction, à l'instar des pilotes de chasse.
A la suite de son père Marcel, Serge comprenait la nécessité pour le président d'une multinationale d'entretenir quelques danseuses : "Le Figaro", mais aussi "Valeurs actuelles" (si l'on peut se permettre de parler ainsi des journaux et des journalistes). Sans le devoir de désinformation, l'histoire du capitalisme ne serait certes pas tout à fait la même.
Sans sa légendaire franchise, Serge Dassault aurait été "de gauche", car l'argument de la paix est le dernier cri pour vendre des avions de chasse à des puissances étrangères ; c'est bien plus efficace que les vieilles techniques marketing de droite. Mais on ne peut pas avoir toutes les qualités, et Serge Dassault en avait déjà pas mal comme ça.
+ Face à l'accusation d'antisémitisme, le "Süddeutsche Zeitung", gros quotidien bavarois, n'a pas tardé à renvoyer son caricaturiste Dieter Hanitzsch (85 ans), auteur d'un dessin (ci-contre) montrant le Premier ministre B. Netanyahou dans la tenue de la gagnante israélienne du très médiatisé concours de l'Eurovision ; le Premier ministre tient un missile dans la main et déclamant le slogan nationaliste israélien : - L'année prochaine à Jérusalem !
Contrairement à son rédacteur en chef, D. Hanitzsch a refusé de faire des excuses. Il a reçu le soutien du dessinateur Chappatte dans "Le Temps" (29 mai), qui invoque l'affront fait à la liberté d'expression et a interdit au "Süddeutsche Zeitung" de reproduire à l'avenir ses dessins.
Comme l'intellectuel juif Hajo Meyer le déplorait, la définition de l'antisémite n'est plus désormais "celui qui hait les Juifs", mais "celui que les Juifs haïssent".
+ A quoi bon la critique d'art ? Baudelaire lui assigna la plus haute fonction de guide, tout en ayant l'intelligence de se positionner en admirateur face à Delacroix (un peu moins face à Manet, dont le caractère moins affirmé l'agaçait).
Jamais la critique d'art n'a eu un statut aussi élevé, au point que l'on ne peut concevoir l'art moderne sans cette dimension critique (rien n'est moins juste que d'associer l'art moderne à la "spontanéité") ; la critique d'art devient même oeuvre d'art à part entière, comme certains fameux poèmes de Baudelaire, bien entendu, mais aussi la prose critique de Sainte-Beuve, qui éclipse bien des littérateurs de son temps, ainsi que Proust dans le sillage de Baudelaire.
Il ne faut pas oublier le genre parodique, dont Baudelaire fait la promotion à travers Daumier ou Hogarth. L'effort contemporain stérile pour encenser le "9e Art" (expression initialement parodique), répond en grande partie à ce besoin critique, bien que d'une façon qui frise parfois le ridicule. Devenue un art, la critique s'expose aussi à l'académisme.
Notons que la publication de critiques de bandes dessinées sur des blogs permet aux auteurs critiqués de défendre leur travail, comme Thierry Murat, auteur d'"Etunwan" (Futuropolis), ne se prive pas ici.
(Ci-contre : silhouette de Baudelaire par Manet).
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Désinformation
dessin par WANER
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Paris La Rouge*
Catalogue par Rémi Kauffer (éd. Perrin) des personnages et mouvements révolutionnaires et terroristes qui ont trouvé refuge au cours des derniers siècles dans la capitale française, à compter de Bakounine et Marx jusqu'aux "Irlandais de Vincennes" et aux djihadistes musulmans.
"Catalogue" est ici volontairement péjoratif car l'ouvrage de R. Kauffer s'apparente à une énumération ; de colonne vertébrale on ne distingue pas. Le bouquin repose sur le constat de la quantité : quantité d'apôtres ou d'acteurs de la révolution, de Bakounine à Pol Pot en passant par Lénine, Blanqui, les Brigades rouges, etc., a fait escale à Paris, le plus souvent fuyant la police, profitant d'une relative tranquillité pour y échafauder leurs plans de révolution(s).
Paris a été le théâtre de plusieurs soulèvements révolutionnaires : cela fut-il un motif pour des révolutionnaires en herbe de s'y réfugier, ainsi que le suggère R. Kauffer ? Peut-être indirectement, mais il ne faut pas sous-estimer des motifs plus pragmatiques, comme la position géographique centrale de Paris, plus facile d'accès que Londres.
Le cas de Marx est significatif, car il se rendit avec sa famille en priorité où la police ne les traquait pas encore ; leur fuite s'achèvera à Londres, où Marx trouva le meilleur accueil (et la meilleure bibliothèque) ; du reste l'admiration de Marx pour les révolutions françaises est très mitigée.
R. Kauffer rapporte que Lénine détestait Paris ("trou infect"), préférant de loin être exilé en Suisse.
"Paris La Rouge" fourmille de détails sur le séjour à Paris de révolutionnaires souvent adeptes de la violence, dont l'auteur tente tant bien que mal (la place est comptée) de résumer les idéologies.
Comme Rémi Kauffer collabore au "Figaro magazine" et au "Point", deux organes de presse en charge de la propagande de quelques industriels capitalistes français, rien d'étonnant à ce que son recueil soit plus idéologique qu'historique.
Tout d'abord, en amalgamant des mouvements terroristes et révolutionnaires assez divers, R. Kauffer s'efforce de discréditer les uns à l'aide des autres. Ainsi la violence actuelle des djihadistes, qui choque de nombreux Français (bien plus que la violence des milliers d'accidents de la circulation imputables à l'industrie automobile), cette violence est faite pour raviver le souvenir des attentats révolutionnaires et anarchistes perpétrés au cours des siècles passés, non moins effrayants.
Une telle rhétorique occulte ou dissimule autant que possible la violence et la privation de liberté contenue dans la notion "d'ordre public".
En pointant la responsabilité de l'école républicaine actuelle et la suppression du service militaire (!?) dans le terrorisme contemporain, R. Kauffer suggère que les djihadistes sont des personnes mal éduquées ; de là à dire que le terrorisme est entièrement dépourvu de légitimité, il n'y a qu'un pas. Exit l'ingérence des Etats occidentaux dans la plupart des gouvernements du Tiers-Monde afin de favoriser l'exploitation de leurs ressources en main-d'oeuvre et richesses minières ou pétrolières... Pourtant on devine que l'islam, à l'instar du marxisme-léninisme ou la théologie de la Libération naguère, exprime avant tout le rejet de l'impérialisme occidental. La religion a souvent servi de prétexte et de cadre à la domination des élites au cours de l'histoire moderne, cependant il arrive aussi parfois qu'elle serve de prétexte au soulèvement populaire.
L'ouvrage de Rémi Kauffer illustre aussi la fascination de la bourgeoisie pour les mouvements révolutionnaires, fascination d'ailleurs en partie réciproque. La violence révolutionnaire a souvent été à l'origine de bouleversements politiques et sociaux entérinés ensuite par la bourgeoisie, de sorte que les régimes bourgeois entretiennent une sorte d'imagerie pieuse de la Révolution et de la violence terroriste. La "démocratie" est un exemple d'idéal révolutionnaire, très éloigné des principes républicains, que la bourgeoisie a fini par adopter... pour mieux le vider de son sens révolutionnaire.
De leur côté, les révolutionnaires s'efforcent bien entendu de prendre la plus grande distance avec l'ordre public et la culture bourgeoises, mais l'usage de la violence, en soi, n'a rien de révolutionnaire ou de neuf ; or la plupart des mouvements révolutionnaires ne parviennent pas à s'en détacher, revenant ainsi au régime d'oppression d'abord maudit. La révolution ne fait ainsi que rebattre les cartes, mais c'est le même jeu qui continue.
Le motif de la science et de l'histoire, caractéristique de Marx et Engels, qui se proposent ainsi de triompher des élites bourgeoises sur le terrain de la pensée, a contribué sans doute à l'aura exceptionnelle de la révolution marxiste. Cependant, en se plaçant sur le terrain de l'histoire et des bouleversements politiques, Marx est conscient que la bourgeoisie et la violence révolutionnaire sont deux phénomènes indistincts. En prédisant l'autodestruction du capitalisme, prédiction à laquelle chaque nouvelle crise mondiale fait écho, Marx prête au capital une force révolutionnaire sans commune mesure avec le terrorisme proprement dit.
Paris la Rouge, par Rémi Kauffer, éd. Perrin, 2016.
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Revue de presse BD (222)
+ La version colorisée de "Tintin chez les Soviets" caracole actuellement en tête des ventes de livres. Il est difficile de savoir ce que Hergé en aurait pensé, lui qui redoutait tant de déclencher la polémique. La chute du Mur de Berlin et le recul de l'idéologie stalinienne ou sartrienne (Hergé était particulièrement chahuté en France) ont libéré le propos anticommuniste, qui n'est plus politiquement incorrect comme dans les années 1950 à 80 - le marketing et la nostalgie ont fait le reste.
+ Une autre institution a pris de l'âge, plus française celle-là, c'est le centre Pompidou. Cette usine à transformer la contre-culture en culture dominante agréée par les élites, fête son quarantième anniversaire.
Gaston Lagaffe et Franquin y sont honorés actuellement à travers une expo. qui souligne l'antimilitarisme de Franquin, alors qu'il n'y a peut-être aucun quartier au monde où patrouillent autant de vigiles, de soldats armés de fusils d'assaut, de flics en tous genre, en uniforme ou en civil ; devant le musée comme à l'intérieur, on est sommé de vider son sac pour un oui ou pour un non.
Pompidou lui-même était un drôle de bonhomme, célébrant la poésie d'une main, et contribuant au capitalisme de l'autre. Janus, le dieu à double visage, ne présiderait-il pas au destin de la bourgeoisie ?
A propos du musée Pompidou, qui à l'instar de Tintin n'a pas toujours fait l'unanimité, le philosophe Jean Baudrillard, tentant d'analyser l'époque, écrivait ceci : "Heureusement, tout ce simulacre de valeurs culturelles est anéanti d'avance par l'architecture extérieure. Car celle-ci, avec ses réseaux de tuyaux et son air de bâtiment d'expo. ou de foire universelle, avec sa fragilité (calculée ?), dissuasive de toute mentalité ou monumentalité traditionnelle, proclame ouvertement que notre temps ne sera plus jamais celui de la durée (...). Notre seule culture, au fond, est celle des hydrocarbures, celle du raffinage, du cracking, du cassage de molécules culturelles et de leur recomposition en produits de synthèse." (In : "Simulacres et simulation")
+ Présentée comme un moment fort de la démocratie, la campagne présidentielle est un mauvais moment à passer pour la satire ; beaucoup de dessinateurs de presse tombent dans le propos partisan, illustrant la remarque de G. Orwell (tirée de l'observation des régimes totalitaires) sur la politisation excessive de tous les sujets. Ainsi le caricaturiste Ixène, employé par la presse filloniste ("Le Figaro"), défend son candidat préféré, en proie aux attaques d'une partie de la presse, "Canard enchaîné" en tête (qui semble découvrir en cette occasion les coulisses du parlement et de la vie politique française).
Les dessinateurs de presse doivent se montrer plus subtil pour ne pas tomber dans le militantisme.
+ Le Comité canadien pour la liberté de la presse lance un concours de dessins satiriques (doté de 2.000 dollars canadiens) sur le thème "Faux et usage de faux" (dessin à envoyer avant le vendredi 31 mars). Ce comité élucide son thème en pointant du doigt le risque de propagation de rumeurs via internet : "Internet serait-il devenu une menace pour les démocraties ?"
Cependant le discrédit de la presse internationale, et française en particulier, précède le boom d'Internet. Ce discrédit de la presse dans le public repose sur des faits, notamment la collusion entre les partis politiques et la presse, ou encore les milieux d'affaire et la presse, ayant donné lieu à des ouvrages solidement étayés.
La propagation de fausses nouvelles, à partir de sources mal vérifiées, n'est pas non plus une innovation d'Internet ; on se souvient de l'affaire des faux charniers de Timisoara (1989), ou plus récemment des fausses armes de destruction massive de Saddam Hussein, impliquant la presse et les journalistes du monde entier. Au cours de la guerre froide, "Le Monde" d'Hubert Beuve-Méry publia comme une information de faux documents fabriqués par les services secrets soviétiques pour faire croire à l'invasion imminente de l'Europe par les forces armées US.
C'est carrément le slogan de la liberté de la presse, dont se gargarisent l'Occident, qui devrait être soumis à la satire.
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Revue de presse BD (145)
Extraits de la revue de presse illustrée publiée chaque semaine en intégralité dans l'hebdo Zébra.
L'atelier de BD en prison (St-Brieuc) par Nicoby (cliquer pour agrandir)
+ Les auteurs de bande-dessinée, sollicités par l'administration pénitentiaire, franchissent parfois la porte des prisons pour y donner des cours de BD. Le dessinateur Bast avait tiré de cette expérience une BD il y a deux ans, "En Chienneté" (La Boîte à Bulles), illustrant les affres de la détention pour de jeunes gens plein de vitalité. A quelques détenus des pénitenciers de Saint-Brieuc, Rennes et Brest, les dessinateurs Joub, Laurent Lefeuvre, Lionel Chouin et Nicoby, ont enseigné les rudiments de la bande-dessinée, sous la houlette de "coordinateurs culturels". La prison moderne n'est pas censée seulement punir et mettre hors d'état de nuire les criminels et délinquants, mais aussi les réformer, leur permettre "d'affirmer leur humanité" ; les interventions de ces jeunes auteurs de BD ont donné lieu à une plaquette, disponible en ligne, et qui constitue une sorte de reportage, même si le but de réforme morale du système carcéral est peu discuté ; or on peut douter de son efficacité, et se demander s'il ne s'agit pas avant tout pour la société civile de se donner bonne conscience. Les planches des détenus voisinent celles des "pros" dans cette plaquette ; les thèmes sentimentaux et violents sont fréquents chez les taulards. Peut-être certains auteurs de BD ont-ils de la sympathie pour les détenus parce qu'ils se sentent eux-mêmes un peu contraints dans leurs cases, accomplissant une tâche parfois un peu répétitive ou séquentielle ?